Au cœur du Cantal, en 1914, les habitants se trouvent confrontés au départ pour la guerre des hommes. Dans les fermes, il ne reste que les femmes, les personnes âgées, les jeunes et les invalides. L’histoire nous dresse le portrait des habitants de trois fermes, Joseph, 15 ans devenu l’homme de la famille suite au départ de son père. Sa grand-mère et Mathilde, sa mère affrontent cette nouvelle vie sans l’homme qui les unissait. Valette, dans la ferme voisine, homme mauvais et irascible ne décolère pas car lui qui voulait faire la guerre, n’a pas été engagé à cause de son moignon, résultat d’un accident. Il accueille avec sa femme, la femme et la fille de son frère tandis que son fils est parti au front. Enfin, Léonard occupe la dernière ferme avec sa femme, témoin discret et attentif, il épaule le jeune Joseph.

Au hameau de Chantegrill, les personnages attendent le retour des soldats en se tuant à l’ouvrage. Les travaux saisonniers sont abattus avec la force des désespérés. Pour tous ces taiseux, la parole n’est qu’utilitaire, elle ne transmet que l’essentiel. Les dialogues, sont donc, tous, riches de sens. Peu à peu se mettent en place les personnages et le décor du drame. C’est un récit intense dans lequel se déchainent les éléments et les passions. Dans cette histoire aux allures intemporelles, l'action se place loin de front de la guerre et la vie continue son chemin en ayant bien peu d’informations sur ce qui se passe réellement. Nous sommes donc plus proche d'un huis-clos qui se situe entre drame familial, ressentiments passés, amours impossibles et émancipation d’un adolescent. Même si le rythme est lent et suit celui des éleveurs, c’est bien la force d’évocation de l’auteur qui en fait un récit fascinant et passionnant à suivre. Il y a aussi sa faveur une proposition graphique intéressante dans laquelle le souci du détail des fonds et des décors, ainsi qu'une palette de couleurs suggestives, compensent les lacunes des figures humaines.