Le jeune Qiao, tout juste majeur, apprend la mort subite de son père, un homme brutal, secret et taiseux, qui lui a pourtant transmis sa passion pour la boxe. Le décès intervient à un moment charnière, laissant Qiao en pleine errance face à une relation compliquée et inachevée. Le film dépeint son cheminement initial face à cette perte et l'empreinte tenace laissée par un parent ambivalent.  Des années plus tard, Qiao est devenu ingénieur. Pour tenter de donner un sens à son passé et de dénouer l'irrésolu de sa relation filiale, il développe un logiciel d'entraînement de boxe en réalité virtuelle (VR). Il modélise un adversaire virtuel qui prend les traits et la manière de boxer de son père. Cette récréation numérique devient à la fois un hommage, une mise à l'épreuve de son propre souvenir, et une confrontation cathartique avec un fantôme technologique qui finit par échapper à son contrôle. Le film se pose comme une méditation sur la mémoire filiale : comment faire face à l'absence et à l'héritage, surtout lorsqu'il est lourd et ambigu ? L'IA sert de passerelle inédite pour guérir des maux intimes, transformant la douleur en un récit à réécrire.

My Father's Son est le deuxième long métrage du réalisateur chinois Qiu Sheng, déjà remarqué pour Suburban Birds (2018). Il s'agit d'une œuvre poignante et singulière qui explore les thèmes du deuil, de l'héritage familial et de la mémoire à travers le prisme de la science-fiction intimiste et de l'intelligence artificielle.  Le réalisateur mêle un réalisme contemporain/futuriste (la ville moderne, la technologie de l'IA) à des surgissements oniriques ou symboliques (l'eau, la boxe). L'utilisation de l'eau est d'ailleurs souvent soulignée par les critiques comme un motif récurrent, évoquant une mémoire fluide et le cycle de la filiation (naissance, mort, mouvement).  Le jeu d'acteur, notamment celui de Weichen Luo (Qiao), est souvent décrit comme étant en retenue, voire clinique par certains, mais cette distance est intentionnelle. Elle contribue à l'aspect maîtrisé et subtil du film, qui privilégie les silences, les hésitations et les regards pour exprimer les tensions émotionnelles. Le dispositif de science-fiction n'est jamais une fin en soi. Il est un outil narratif qui permet d'explorer la perte et la manière dont la technologie peut recomposer l'image de l'être cher, le rendant à la fois spectral et tangible. Le tournage à Hangzhou, la ville natale de Qiu Sheng, et le mélange entre dialecte local et mandarin officiel ajoutent une couche d'intimité face à la froideur du monde adulte.