Dans les brumes épaisses d’un Berlin au bord de la rupture, un tueur rôde… et un cinéaste s’apprête à capturer l’ombre. Lorsque l’Inspektor Lohmann de la Kriminalpolizei entraîne Fritz Lang à l’intérieur d’une taverne enfumée, le célèbre cinéaste berlinois est bien loin de se douter de l’étrange pacte faustien que le policier va lui proposer : une plongée dans le monde du crime en échange de son inspiration. Lohmann entraîne le réalisateur dans les bas-fonds de Berlin, sur les traces d'un monstre. Ce qui s’annonce comme un film devient une plongée obsessionnelle dans les ténèbres, entre hypnose, pulsion de création et souvenirs enfouis.

Krimi, c’est la rencontre fascinante entre la réalité d’une enquête criminelle glaçante et la fiction d’un créateur en mal d’inspiration. Dans ce Berlin de 1930, l’inspecteur Lohmann entraîne Fritz Lang – oui, le Fritz Lang – dans les bas-fonds d’une ville où la peur s’installe, ronge les murs, alimente les fantasmes. Car le “vampire de Düsseldorf” rôde, et l’Allemagne vacille. Alex W. Inker, fidèle à son trait charbonneux et expressionniste, restitue une époque où tout vacille. Chaque page est un décor de cinéma, chaque planche une scène où se mêlent fascination, horreur et décadence. Le scénario de Thibault Vermot s’inscrit comme un hommage vibrant au cinéma noir et à une époque où l’art cherchait à survivre dans un monde en crise. On y croise les monstres humains… et ceux que l’on forge pour supporter la réalité. Dans ce polar historique aux allures de documentaire, la fiction s’infiltre dans l’Histoire. Fritz Lang, en pleine métamorphose intérieure, se révèle miroir des angoisses de son temps. Entre les ruelles poisseuses, les cabarets déclinants et les voix des victimes, Krimi nous confronte à la peur – celle d’un monde qui glisse, d’un avenir incertain, d’une humanité qui s’égare.