Le voleur d'art Nemo (Willem Dafoe) réalise son prochain gros coup. Il veut voler un tableau d'Egon Schiele valant plusieurs millions de dollars dans un penthouse new-yorkais. Au début, tout se déroule comme prévu, mais l'alarme se déclenche et l'appartement est bouclé. Lorsque le système de sécurité tombe complètement en panne, Nemo est non seulement pris au piège, mais il ne peut plus avoir aucun contact avec le monde extérieur. Les jours deviennent des semaines, les semaines des mois. Mais ni l'agent de sécurité en bas dans le hall, ni la femme de ménage à l'extérieur devant la porte de l'appartement ne se rendent compte que quelqu'un est enfermé dans le penthouse. Lentement mais sûrement, Nemo est à court de nourriture et d'idées pour s'échapper de sa prison.

L'acteur américain Willem Dafoe est l'homme des affaires solitaires. Que l'on ne se méprenne pas, la palette de Dafoe, né le 22 juillet 1955 à Appleton, Wisconsin, est énorme. La plupart du temps, il incarne un méchant ou un personnage loufoque, mais il a en fait déjà tout joué (à l'exception peut-être de l'amant adolescent). Il incarne cependant très souvent - du moins ces derniers temps - le loner, le solitaire ou encor l'ermite. Dans le biopic "At Eternity's Gate" (2018) du réalisateur Julian Schnabel, il s'est retiré dans l'isolement du sud de la France dans le rôle du célèbre peintre. Dans " The Lighthouse" (2019) du cinéaste Robert Eggers, Dafoe a joué les fous aux côtés de Robert Pattinson dans l'isolement d'une nature rude. Et dans "Siberia" (2020) d'Abel Ferrara, il s'est retrouvé dans la toundra glacée dans des états hallucinatoires. Lorsque le réalisateur Vasilis Katsoupis enferme Willem Dafoe dans un appartement de luxe dans son jeu de chambre artistique "Inside", c'est aussi un voyage intérieur. "Inside" compte parmi les films de chambre les plus intéressants et les plus réussis, car le scénariste Ben Hopkins parvient à maintenir l'équilibre entre le thriller et le film d'art. Pour Hopkins, né en 1969 à Hong Kong, qui est également réalisateur et a réalisé des films comme "Les neuf vies de Thomas Katz" (2000) et "Welcome to Karastan" (2014), cela n'a rien d'inhabituel. Ses films oscillent souvent dans la zone grise entre le film de genre, le film d'art et d'essai et le métafilm. Il en va de même pour "Inside". Pendant longtemps, le public se demande si le voleur d'art joué par Willem Dafoe parviendra à s'échapper de sa cage dorée. Et on attend avec impatience de voir ce qu'il va inventer ensuite pour survivre face à la mort imminente. En même temps, il y a toujours un niveau métatextuel et métaphysique. Le voleur de Dafoe ne s'appelle pas Nemo sans raison. Au lieu de partir à la chasse au trésor à 20 000 lieues sous les mers, il échoue sur les toits de New York. Entouré d'œuvres d'art dont le produit de la vente pourrait lui permettre d'acheter de la nourriture jusqu'à la fin de sa vie, il risque de mourir de faim et de soif. Le réalisateur Vasilis Katsoupis ne montre pas seulement la lutte pour la survie de son protagoniste, aussi ingénieuse que de plus en plus désespérée, mais aussi des choses que des films comparables laissent volontiers de côté (mot-clé : défécation). Plus la détresse de Nemo se prolonge, plus l'action du film dérive avec son esprit dans une autre sphère. La tentative d'évasion devient elle-même une œuvre d'art, le comportement de Nemo une performance, jusqu'à ce qu'il transforme complètement l'appartement de luxe en son propre musée, afin de laisser quelque chose au monde. Car comme il nous le dit au début et à la fin de ce film : "Les chats meurent, la musique se tait, mais l'art reste pour toujours".